jeudi 1 novembre 2018

La ville aux mille sièges

Les siècles ont offert au peuple catalan la résistance dans l'âme, et aux heures désespérées de leur histoire ils ont toujours honoré ces siècles de leur offrande.

Depuis 1714 déjà, on célèbre malgré la prise de Barcelone par les Bourbons, le courage indéfectible des vaincus qui ont lutté jusqu'au bout, symptôme peut-être d'une nation toujours en guerre, qui laisse planer avec le vent local, le garbi, un petit air perpétuel d'insurrection.

Gérone, discrète dans l'ombre de la mégalopole où l'on s'échine depuis un siècle à terminer une cathédrale interminable, est ainsi surnommée "La ville aux mille sièges" pour en avoir subi plus de treize entre 1295 et 1809.
Et même sous la puissance des assauts français, à cette époque où Napoléon, sur plusieurs fronts, mettait le monde à ses pieds, la ville resta fière. On la nomma alors "La trois fois immortelle" pour avoir essuyé trois sièges lors de la guerre d'Indépendance, trois sièges en une seule année.
Le 20 juin 1808, quelques soldats et des civils repoussent les troupes napoléoniennes qui n'auront pas le temps de franchir les remparts, de suivre le long de l'Onyar les allées de saules pleureurs, et se perdant dans le Call, gravir l'escalier monumental de la Cathédrale Santa Maria.
Le 22 juillet, deuxième tentative qui échoue encore, quand d'autres empires, plus grands encore, par-delà les Pyrénées, avaient montré moins de résistance à l'ambition de Napoléon.
Enfin, avec plus d'hommes, plus d'artillerie, la France assiège une nouvelle fois Gérone en mai 1809. Et sous le gouvernement d'Alvarez de Castro, la ville résiste à sept mois de siège, avec parfois des victoires éclatantes. Le 19 septembre, "le Grand Jour de Gérone", les troupes françaises sont même contraintes de battre en retraite. Mais la puissance de l'armée ennemie est, à cette époque encore, sans limite. Et la ville cède peu à peu. La famine et la maladie, que le commandant Alvarez en personne subira de plein fouet, contraignent Gérone à capituler le 11 décembre, ayant perdu la moitié de sa population, laissant pourtant moins le souvenir d'une défaite que celui d'une persévérance que seuls les siècles en effet avaient pu bâtir.

Photo de Gérone:


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