lundi 29 mai 2017

Dans les lézardes du temps

C'est ainsi qu'il nous faut commencer. Toujours. Là, dans l'interstice, dans les plis et les crevés. Dans les lézardes du temps. Là où l'on peut encore respirer, où l'on peut encore souffler.
Nous bavarderons, nous nous étonnerons, nous nous passionnerons. Enthousiastes, ivres, mais aussi critiques. A propos de tout et de rien. De presque rien, mais parfois de l'essentiel. Quelques bagatelles, et encore, que nous nommons par facilités de langage: de l'art. Nous prendrons donc le temps d'aller ici et là, au gré de nos humeurs. Car aujourd'hui c'est devenu un grand luxe que d'avoir un peu de temps à perdre. Et pourtant, quel plaisir! C'est souvent dans ce temps perdu que l'on gagne le plus.
Il s'agit parfois de voyager. Seulement. De découvrir, d'apprendre. De lire un peu, dans le coin d'une chambre. D'apprécier ceci ou cela. Littérature, cinéma, musique, coups de foudre, coups de cœur et de gueule, grains de sel, grains de beauté, beaux-arts, musées, expositions, culture, idées, pensées, billets d'humeur de toute sorte. Il s'agit aussi de se reposer un peu de la vitesse des choses. Du rythme quotidien. Du bruit. Des cris. De rentrer un peu au-dedans de nous-même. Simplement. Voir ce qu'il en est de nos vies intérieures. Et après tout, pourquoi pas? 
Curiosités, plaisirs et envies partagés. Chacun peut musarder à sa guise. S'arrêter à la lecture d'un extrait, d'une pensée en mouvement, parfois aussi immobile, dans l'attente qu'un lecteur prenne le relais. S'enthousiasmer à son tour évidemment, ou pas. 
Il s'agit de partager, de s'irriter, de défendre ce que l'on aime, même quand on aime sans raison.. Et pourtant parfois se laisser saisir dans l'instant, ou dans le désir d'être un autre, d'être ailleurs. Et puis le reste. Ce n'est d'ailleurs pas tout à fait un blog, mais d'abord une agora dans l'espace réduit d'une page numérique. Arrêtons-nous un temps de courir. Ouvrons les yeux en grand, "c'est de l'autre côté de la vie" disait Céline en exergue du Voyage au bout de la nuit. Cet autre côté de la vie, c'est assurément déjà un peu cette vitesse des choses, dans les lézardes du temps. Reposons-nous donc de la vitesse des choses, reposons-nous aussi au sein même de la vitesse des choses. Savourons, lisons, aimons, mais aussi détestons et rageons! C'est notre droit mais aussi un devoir.

"Il est un instant où, sans qu'on le sache, tout acquiert une même impulsion, une même harmonie et un son incomparable et précis. Le son de la vitesse des choses est celui que Dieu produit quand il respire si loin de nous. On le retrouve un peu dans la seconde où les marées changent ou dans le craquement du premier flocon de neige se détachant des cieux." (La Vitesse des choses, Rodrigo Fresan, Passage du Nord-Ouest, 2008)

D'ailleurs, ceci n'est pas le premier billet de ce blog. Seulement une prise d'élan.

Photo prise au Musée Jean Cocteau de Menton.


    
                                                

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