vendredi 13 octobre 2017

Un monde fou, fou, fou!

Il faut en convenir: notre terre ne tourne plus très rond. Bref, c'est le bordel, et je ne dis là rien de nouveau. Chaque matin, on se réveille, las, désabusé, la gorge serrée, la boule au ventre parfois, anxieux à l'idée de reprendre en plein vol le bruit de fond du monde, ce continuum que l'on a laissé le temps d'une nuit, tout aussi las, désabusé, la gorgé serrée, la boule au ventre parfois. Fatigué du monde deux fois par jour, horrifié, amusé comme on peut l'être d'une farce grotesque. Deux fois par jour, disais-je: quand on le quitte pour dormir et quand on le retrouve le lendemain, en marmonnant dans sa barbe, pour soi-même: quel bordel...

-Bon, déjà, le président de la nation la plus puissante du monde est un enfant milliardaire, mégalomane, narcissique, colérique et déjanté. A moins d'être un génie qui ne dit pas son nom, les experts s'accordent à dire qu'en plus il serait idiot. Tout simplement. Mais, c'est lui le boss, alors voilà!

-Le tyran à la tête d'une nation enfermée sur elle-même, à ce jour la plus dangereuse de notre temps, est lui aussi un enfant; un enfant à qui on a laissé jouer avec quelques missiles nucléaires et autres bombes hydrogènes, à ce qu'il paraît, du moins... Et après tout, qui sommes-nous, nous, pour juger l'éducation de l'enfant d'un autre? Si, au moins, il ne nous envoyait pas au-dessus du crâne ses jouets comme de vulgaires avions en papier! Mais là encore, c'est lui le boss. Petite précision: le président précédemment cité le surnomme Rocket Man. Little Rocket Man sans que l'on sache s'il s'agit là d'une marque d'affection. Les experts hésitent.

-Un fou furieux est à la tête d'une nation millénaire que sa politique a ravagée. Villes dévastées, populations massacrées, le pays tout entier en morceaux. On a dit qu'il ne tiendrait pas, que la guerre qu'il a menée contre son propre peuple aurait à la longue raison de lui. Et la pression des rebelles, de la sacro-sainte communauté internationale ferait en sorte que... Balivernes! On répétait qu'un coq dont on a coupé la tête bondit ici et là avant de mourir pour de bon, c'est ce que l'on a dit! Balivernes, encore une fois! Tout est parti en couilles, les médias ont fini par s'en lasser et ont détourné leur attention... Bref, à ma connaissance, il est toujours au pouvoir...

-Notre président à nous était absolument inconnu il y a moins de deux ans. Il a dit: je serais président, vous verrez, on a tous ri. Ben, ça y est, il est président!

-La médecine fait des progrès extraordinaires chaque jour: greffes, opérations à cœur ouvert et nano-chirurgie sont devenues monnaie courante, et j'en passe. Mais voilà que l'on s'enrhume et aucun médecin peut nous dire autre chose que:"Monsieur, il faut prendre votre mal en patience." Et on se shoote au Fervex, que faire d'autre?

-Plus personne ne semble savoir communiquer ni même sympathiser avec qui que ce soit. Heureusement on sait tous tweeter et partager la dernière vidéo d'un chat qui chute. Les amis? On les ajoute ou on les supprime. C'est bien plus pratique!

-On a exhumé Dali et on a fait un test de paternité à partir de sa moustache (what else?) parce qu'une imbécile heureuse a prétendu être sa fille. Ben, en fait non, et on l'a remis en terre. Dali, je veux dire, pas la nana... Ni vu ni connu.

-La Grande-Bretagne a quitté l'Union Européenne. On a tous dit: ils ne vont pas oser... Ben si.

-La Catalogne a déclaré son indépendance dernièrement, avant de la suspendre pour favoriser le dialogue avec Madrid. Madrid leur a répondu:"Vous êtes indépendants, oui ou merde?" Le monde entier attend, dans la confusion, leur réponse.

-Des fous égorgent les passants dans nos villes, prennent un camion et foncent dans la foule, se font exploser ici et là. Et même à la terrasse d'un café, on peut se retrouver cribler de balles.

-On nous apprend tous les jours qu'un nouvel aliment est cancérigène et combien tel ou tel produit vaporisé sur nos fruits et légumes est toxique. Ne pas en manger tue, en manger aussi, apparemment. Les médicaments qui doivent nous guérir s'avèrent "selon une toute dernière étude" hautement nocifs; leurs effets ressemblent parfois à une mauvaise blague: certains devenaient même aveugles, alors ça faisait des histoires. On se demande comment on parvient encore à rester vivant.

-Des mouvements féministes commencent à parler de l'écriture inclusive et d'autres inepties en faveur d'une égalité totale des sexes sans comprendre que la langue française a d'autres chats à fouetter que de se voir infliger une typographie au bord du non-sens. Et ces mêmes mouvements, toujours dans un désir d'égalité, cela semble évident, trouve logique d'afficher dans le métro de quelques grandes villes des panneaux rappelant à l'ordre les hommes négligents qui pourraient s'asseoir en écartant grossièrement les jambes, mettant dans l'inconfort la femme (car la victime est nécessairement une femme, dans ce cas précis, c'est évident) qui est assise sur le siège voisin. Il est tout à fait indiscutable là encore qu'il n'y a que les hommes pour s'asseoir de la sorte, sans prendre en considération la présence d'autrui... Ben oui, ce sont des hommes, enfin, ils ont le monopole des incivilités, c'est bien connu! Sous prétexte d'abolir les discriminations de genres, contre lesquelles il faut absolument lutter bien sûr, certains mouvements qui manquent clairement de discernement ne font que perpétuer la guerre des sexes!

-Enfin, on se rend compte que la littérature n'appartient plus à ceux qui lui ont voué allégeance, ce qui est regrettable; que les médias aussi sont, -depuis le temps qu'ils y aspiraient, ils doivent être ravis-, enfin le véritable pouvoir de nos démocraties. On a remplacé Dieu par des divinités toutes-puissantes: Facebook, Google et les autres. Nous nous sommes créé nos propres dictatures, nous participons nous-mêmes à l'atrophie de nos consciences. Facebook a déjà censuré sur ses pages L'Origine du monde de Courbet ou encore une photo de la fontaine du Neptune d'Ammannati. Ben oui, les statues baroques sont nues, celle-ci l'est particulièrement en plus! L'art, Facebook ne sait pas ce que c'est. Il arrive aussi que Google ait l'amabilité de nous mettre en garde: "Attention, tout le monde peut voir ce que vous faites en ligne". Heureusement qu'il est là, n'est-ce pas? Oui, mais non. Comme par provocation, un petit encart s'ouvre parfois: "Google aimerait connaître votre position". Ben voyons, c'était trop beau! C'est bien le souci, on décide d'entrer dans nos cerveaux et on nous les suce jusqu'au bout!

Bref, un monde fou, fou, fou, c'est certain. Terrifiant et drôle à la fois. Et encore s'il n'y avait que cela! A dormir debout, à nous donner des cauchemars!

Photo prise au musée Dali de Figueres:




Saint-Tropez Jazz

 Au Café des Arts, des touristes anglais et allemands s'esclaffent, tonnent, gloussent. J'observais ce joyeux fatras, silencieux. A ...